anti-MICI

Régimes anti-MICI?

Que penser des fameux régimes anti-MICI… nous faisons un point ici sur les régimes anti-MICI les plus populaires et leurs intérêts dans une Maladie de Crohn (MC) et une Rectocolite Hémorragique (RCH).

Le régime pauvre en résidus

Le régime pauvre en résidu consiste en la suppression d’aliments contenant des résidus, c’est à dire les fibres, que l’on retrouve à travers les légumes et les fruits crus et cuits, les légumineuses, les céréales complètes (pain complet, féculents complets, boulghour, quinoa), et au sens le plus strict le lactose avec le lait, le fromage blanc, les petits suisses et les fromages frais.

La seule indication à ce régime est la préparation à la coloscopie. Il pourra éventuellement vous être prescrit lors d’une poussée inflammatoire en fonction de l’intensité de vos symptômes (douleurs digestives, gaz, ballonnements, selles liquides et fréquentes). Ce régime a pour but de mettre le tube digestif au repos en réduisant le volume et la fréquence des selles. Il ne permet de passer en rémission ni de prévenir l’apparition d’une poussée inflammatoire. En aucun cas ce régime doit être prolongé après une poussée car à risque de carence nutritionnelle, de fatigue, de dénutrition, de troubles alimentaires, etc. Il vous est possible pendant cette période d’élargissement de vous faire accompagner par une diététicienne.

Le régime sans gluten

Le régime sans gluten consiste en la suppression des aliments contenant la protéine du gluten qui est présente naturellement dans certaines céréales. Le gluten est présent en abondance dans le blé mais aussi en moindre mesure dans le seigle, l’orge, l’avoine, le kamut, l’épeautre, le petit-épeautre ou encore le triticale (croisement entre le blé et le seigle).

Le régime sans gluten est indiqué uniquement en cas de maladie cœliaque confirmée. Cependant, lors d’une hypersensibilité secondaire au gluten, une possibilité d’amélioration des symptômes peut être constatée après une éviction mais il est primordial de réintégrer le gluten après quelques semaines lorsque la perméabilité de l’intestin est restaurée.

Aucun effet n’a été démontré en faveur d’une éviction du gluten par des études dans la prise en charge des MICI. Il s’agit d’un régime peu convivial et extrêmement contraignant qui engendre de nombreuses carences, un risque de perte d’appétit et de dénutrition ; il est donc fortement contre-indiqué.

Les régimes anti-MICI dits “anti-inflammatoires”

Un fléau guette les malades : ce sont les régimes dit anti-inflammatoires. Comment ne pas comprendre un patient souvent désemparé qui, cherchant une solution à son problème et tombant sur des sites ou des ouvrages qui affirment de manière péremptoire que la solution qu’ils proposent est miraculeuse, modifie son régime ou teste des aliments ou des compléments alimentaires dont on lui a vanté les mérites.

Citons les jus de légumes anti-inflammatoires, les cures de “détox”, mais surtout les sinistres régimes chasseurs-cueilleurs et paléolithiques (régime Seignalet, etc.) basés sur le concept binaire suivant : les MICI et d’autres maladies n’existaient pas avant, mangeons donc comme avant pour ne pas être malade ! C’est oublier que de nombreuses études scientifiquement indiscutables n’ont pas permis de montrer de bénéfice clair à un régime d’exclusion quel qu’il soit sur les poussées de MICI.

Le jeûne thérapeutique « détoxifiant » est également très en vogue. L’idée vient du cancer et du concept qu’il faut limiter la consommation de sucres pour ne pas nourrir la tumeur. Ce questionnement peut être rapproché de l’engouement actuel pour les régimes de jeûne intermittent, de restriction calorique ou le régime cétogène. Ces régimes favorise la dénutrition et la sarcopénie, ils ne sont donc pas recommandés dans le cadre des MICI.

Le régime pauvre en FODMAPs

Le régime pauvre en FODMAPs dont l’intérêt est démontré dans le syndrome de l’intestin irritable est de plus en plus étudié au cours des MICI. Il limite les aliments contenant des glucides ou sucres que l’on dit «fermentescibles». Les aliments dit fermentescibles sont par exemple la pomme, la poire, les asperges, les champignons, les pâtes de blé, les légumineuses, le lait avec lactose, etc.

Une étude réalisée en 2018 chez 52 malades ayant une MICI en rémission a montré qu’un régime pauvre en FODMAPs améliorait les symptômes de manière significative malgré des taux de calprotectine fécale et de CRP inchangés.
Ce type de régime semble donc agir plus sur les symptômes que sur l’inflammation. Il peut être utile aux patients mais le mettre en place efficacement est très complexe et peut entraîner des carences, il est nécessaire de consulter une diététicienne spécialisée dans ce domaine.

Faut-il prendre des compléments alimentaires?

On sait qu’une alimentation riche en huile de poisson (les acides gras oméga 3) est associée à un risque réduit de développer une MICI. La tentation était grande de proposer une supplémentation en oméga 3 chez les malades atteints de MICI. Quelques études semblaient montrer un bénéfice, mais malheureusement arrivées au stade 3 de l’expérimentation, ces études n’ont pas permis de montrer de réduction des poussées chez les malades en rémission.

De très nombreux compléments alimentaires, notamment à base de plantes, sont supposés agir contre l’inflammation et sont proposés aux malades par divers moyens notamment internet. Très peu ont fait l’objet d’études démontrant leur efficacité et leur innocuité.

La curcumine, très à la mode et prônée efficace dans de très nombreuses maladies, a fait l’objet d’études prometteuses dans la RCH. Un travail récent dans la MC ne semble pas confirmer ces résultats.

Dans une autre étude, une plante médicinale traditionnelle chinoise, le qing-dai (indigo naturalis), vient d’être testée dans la RCH. Elle semble efficace, mais près de 20% des patients ont développé des anomalies biologiques hépatiques et l’essai a été stoppé prématurément car un patient a développé une hypertension artérielle pulmonaire.

La prise systématique et prolongée de compléments alimentaires peut être dangereuse et n’est pas recommandée.

La question de l’intérêt de la prise de probiotiques se pose également souvent. Il existe de très nombreux produits de qualité très variable. Les probiotiques actuels n’ont aucun intérêt démontré dans la MC.

Concernant les vitamines et les micronutriments, seule une carence confirmée par un bilan sanguin justifie une supplémentation. Au cours des MICI, la recherche systématique de carences en vitamines B9, B12 et D et en fer, voire en zinc chez les malades qui présentent une diarrhée importante semble justifiée. La vitamine D possède d’importantes propriétés immunomodulatrices, qui suggèrent un effet bénéfique au cours de la MC. Un taux bas de vitamine D est associé à un risque plus élevé de développer une maladie de Crohn. Chez les patients porteurs de MICI, une insuffisance en vitamine D est fréquente et semble associée à une maladie plus active maladie plus active.

Régimes anti-MICI, concrètement, que faut-il faire?

Le sujet de l’alimentation doit être abordé dès la première consultation avec votre médecin. Le médecin doit être proactif et ne pas attendre que son malade lui en parle et lui annonce qu’il suit tels régimes anti-MICI découverts sur internet ou grâce aux conseils d’amis. Il faut essayer d’en savoir plus sur ce que le patient mange afin de détecter les erreurs alimentaires et accompagner un éventuel changement des habitudes alimentaires. Il faut donner des conseils de bon sens et
les personnaliser. Les régimes anti-MICI n’existent pas, il faut l’expliquer au malade qui bien souvent l’attend. Il faut privilégier une alimentation plaisir plutôt qu’une alimentation sanction en adaptant les conseils à l’état digestif (poussée, stomie, grêle court, rémission, diarrhée, constipation, douleurs abdominales, gaz, ballonnements, etc.) et aux préférences du patient. Il est aussi très souvent utile d’orienter le patient vers des ateliers diététiques, une consultation diététique, un programme d’éducation thérapeutique.